Droit du travail : droits de la personne au travail ?

la Cour dans Schlumpf et c’est à cette même date que la Cour européenne des droits de l’homme est revenue sur la phase de deux ans d’observation par un psychiatre, la jugeant trop rigide par rapport à la réalité du vécu de la personne qu’elle soit médicale, biologique et psychologique (Commission européenne, 2012, p.29 ; Ziegler et al., 2015, p. 50-51). Suite à cela, le Tribunal fédéral a admis qu’une transgression à cette contrainte de deux ans peut être faite dans certaines situations exceptionnelles (Ziegler et al., 2015, p. 144).
Toujours d’après le Tribunal fédéral, seuls les cas graves de transsexualisme, à qui ne suffisent pas les traitements psychothérapeutiques et hormonothérapeutiques, ont la possibilité de changer de sexe. Cette opération est faisable seulement à partir de 25 ans après une période d’observation d’environ deux ans et des investigations médicales et psychiatriques approfondies. D’après lui, la caisse-maladie est dans le devoir d’assumer financièrement l’opération si la personne trans* a suivi une psychothérapie pendant une période de deux ans environ, suivant la situation, qu’un diagnostic de “cas grave de transsexualisme véritable” est établi durant ces deux ans, qu’un traitement hormonal a été pris. Cependant, chaque situation doit être examinée pour savoir si elle répond aux critères de l’art. 32 al. 1 LAMal qui exige que la prise en charge soit efficace, adéquate et économique (Ziegler et al., 2015, pp. 144-149).
En 2011, la septième version “des Standards de soins pour la santé des personnes transsexuelles, transgenres et de genre non conforme”, dont les normes citées dans ce texte sont les plus reconnues mondialement, a été publiée par l\’association professionnelle mondiale pour la santé des personnes transgenres (WPATH). Cette association se base sur une approche axée sur la personne en considérant chaque trans* comme un individu qui a sa propre bibliographie, ses particularités et ses besoins. Elle ne précise donc pas de nombre d’années de psychothérapie puisque chacun est différent, avec des besoins différents et elle ne considère pas la psychothérapie comme une condition de traitement somatique (Ziegler et al., 2015, pp. 144-149).
La WPATH mentionne comme condition un diagnostic de dysphorie de genre persistante et bien documentée pour avoir recours à la chirurgie. La nécessité d’un traitement hormonal avant une opération, cité par le Tribunal fédéral, n’est pas repris par la WPATH qui juge qu’il devrait être prescrit uniquement s’il représente un besoin pour la personne et ne pas être un obstacle en cas de
refus. Au début de l’année 2014, le forum médical suisse (FMS), qui est la référence pour la psychiatrie et la psychologie, a changé ses recommandations de conseil et de traitement en se basant sur certaines normes de la WPATH. Actuellement, des recherches sont effectuées sur le traitement d’enfants et d’adolescents. La WPATH n’impose pas d’âge minimum, cependant, l’intervention doit être irréversible et la personne doit avoir la capacité de donner son accord. Ce critère est analogue aux droits suisses qui exigent que la personne soit capable de discernement (Ziegler et al., 2015, pp. 144-149).
Le traitement hormonal de substitution est sous forme de médicaments autorisés par Swissmedic pour tous, sauf pour les personnes trans* qui devaient se procurer le traitement sur le marché noir. Le Conseil fédéral a ensuite publié l’art. 71a de l’ordonnance sur l’assurance-maladie (OAMal) qui permet la prise en charge par la caisse-maladie de ces médicaments pour les personnes transgenres (Ziegler et al., 2015, p. 150).
De nos jours, la jurisprudence a établi que si les prestations demandées par la personne transgenre pour sa réassignation sexuelle sont efficaces, appropriées et économiques, tous les coûts doivent être pris en charge par l’assurance-maladie. Ceux-ci comprennent le suivi psychiatrique, le traitement hormonal, la chirurgie mammaire, l’ablation des organes reproducteurs, la reconstruction d’organes génitaux, l’épilation faciale, la chirurgie faciale, la réduction de la pomme d’Adam, les séances de logopédie, le raccourcissement des cordes vocales et la transplantation capillaire. Les opérations chirurgicales de réassignation sexuelle, sont rarement pratiquées en Suisse et par très peu de chirurgiens. Les prestations faites en division hospitalière commune sont remboursées par la LAMal, cependant, puisqu’elles sont rares en Suisse, beaucoup de personnes trans* partent se faire opérer à l’étranger et dans ce cas, l’assurance obligatoire ne prend pas à sa charge les coûts. La personne trans* doit alors contracter soit une assurance complémentaire qui prend en charge les opérations effectuées à l’étranger soit une assurance dans le secteur privé (Ziegler et al., 2015, pp. 150-152). En 2008, une femme trans* s’est fait opérer en Thaïlande et a obtenu un remboursement de ses opérations après sept années de combat, cependant, c’est le seul cas connu jusqu’à aujourd’hui (s.n, communication personnelle, 19 septembre 2018).
Concernant les réassignations sexuelles hormonales et chirurgicales qui sont faites contre la volonté de la personne trans*, comme par exemple la stérilisation, elles sont désignées, selon l’art. 122 ss du Code Pénal, comme des lésions corporelles. Celles-ci sont parfois forcées par les médecins pour la reconnaissance civile de l’identité de genre et ils pourraient être poursuivies devant la justice pénale (Ziegler et al., 2015, p. 197).

Droits au travail :
Le droit du travail est dans le devoir de respecter les droits fondamentaux pour tous les collaborateurs et durant toute la période de relations au travail. Ceux-ci, au plan fédéral, se répartissent dans les droits constitutionnels à l’égalité (art.8 Cst.), à la liberté personnelle (art.10 Cst), à la protection de la sphère privée (art.13 Cst.), à la liberté de conscience et de croyance (art. 15 Cst.), à la liberté d’opinion et d’information (art.16 Cst.), principalement. La loi sur le travail (LTr) de chaque entreprise, s’occupe de la protection de la santé, la prévention des accidents, le temps de travail et de repos. Elle est la même pour tout le monde sauf pour les femmes et les jeunes employés qui ont des dispositions spéciales (Ziegler et al., 2015, pp. 545-547).
Selon l’art. 328 ss du Code des Obligations, l’employeur est dans le devoir de protéger la personnalité du travailleur, ce qui prend en compte la discrimination possible pour cause de la transidentité. Cependant l’employeur a également le droit d’exiger à tous ses employés des consignes de comportement accompagnées de justifications si elles affectent la sphère personnelle. Pour les personnes trans*, les prescriptions vestimentaires peuvent leur être faites malgré qu’elles fassent partie de la sphère personnelle du travailleur (Ziegler et al., 2015, pp. 191-192). Néanmoins, elles peuvent être exigées uniquement pour la sécurité du travail, du contact avec la clientèle ou pour l’image de l’entreprise. Elles ne peuvent en aucun cas être demandées pour que le travailleur corresponde à l’image sociale souhaitée (Ziegler et al., 2015, p. 525).
En ce qui concerne l’environnement physique de l’établissement de travail, l’employeur est dans le devoir de trouver une solution, pour les infrastructures séparées en fonction des genres, qui permette de protéger la personnalité de tous les employés. Ce devoir d’assistance fait partie de l’art. 328 du Code des Obligations. Un autre devoir d’assistance de l’employeur (art. 328b CO) est celui de ne pas divulguer la transidentité de l’employé si cela n’est pas nécessaire (Ziegler et al., 2015, p. 192).
Dans la situation où un déclassement professionnel est fondé sur la transidentité d’une personne, celle-ci peut se retourner contre son employeur pour atteinte à la personnalité ainsi qu’au devoir d’assistance (Ziegler et al., 2015, p. 192). Si l’employeur décide de résilier abusivement le contrat d’une personne trans*, un contrôle doit être effectué pour savoir si les raisons sont discriminatoires et dans ce cas, ne respectent pas le droit à l’égalité qui est un droit constitutionnel. Lors de licenciements discriminatoires et selon l’art. 10 LEg (Loi sur l’égalité), la protection contre le licenciement est appliquée pendant le temps de procédure (Ziegler et al., 2015, p. 194). Cependant, d’après une étude faite par le Conseil de l’Europe, peu de personnes LGBT se lancent dans des actions de justice car celles-ci les forceraient à dévoiler publiquement leur identité transgenre qui pourraient amener d’autres discriminations par la suite (Ziegler et al., 2015, p. 515).
Une personne trans* qui décide de se faire opérer pour la réassignation sexuelle durant la période de travail, ne pourra pas aller travailler pendant un certain temps. Cet empêchement n’est pas une faute de la part de la personne trans* ce qui signifie que l’employeur devra continuer à verser le salaire (Ziegler et al., 2015, p. 193).
Après avoir eu un aperçu sur les lois et les droits des personnes trans* dans le monde, en Europe et en Suisse, nous allons aborder l’implication de l’ergothérapie dans cette problématique et les champs d’action possibles avec la population trans*.