Les concepts de la croyance, le savoir et la vérité

Toute vérité n’est pas vérifiable: imaginons que l’on vous montre un panneau et que l’on vous demande quelle est sa couleur. Vous dites que le panneau est de couleur rouge et jaune. On peut parler de vérité indubitable, puisque vous voyez ce panneau comme rouge et jaune. Par contre, si je montre ce même panneau à une personne atteinte de daltonisme, elle ne dira pas que ce panneau est jaune et rouge, puisqu’elle ne différencie pas le rouge du vert. Pour cette personne, le panneau pourrait être jaune et vert. Qui a raison?

N’êtes-vous pas tous deux aussi convaincus de la couleur du panneau? Il est aussi vrai que ce panneau est jaune et rouge pour vous, qu’il est vrai qu’il est vert et rouge pour l’autre, si bien que le degré de certitude, et donc de vérité de l’une ou l’autre des affirmations paraît le même. “La croyance, ou la valeur subjective du jugement, par rapport à la conviction (qui a en même temps une valeur objective) présente les trois degrés suivants : l’opinion, la foi et la science. L’opinion est une croyance qui a conscience d’être insuffisante aussi bien subjectivement qu’objectivement. Si la croyance n’est que subjectivement suffisante et si elle est tenue en même temps pour objectivement insuffisante, elle s’appelle foi. Enfin la croyance suffisante aussi bien subjectivement qu’objectivement s’appelle science.” Pour Kant, il existe des degrés de croyance: l’opinion, la foi et le savoir.

Alors que Platon dit qu’il existe non pas une multiplicité d’opinions vraies, mais un seul savoir, une seule science véritable. Croire et savoir sont donc deux choses distinctes. “Au sens large, croire c’est tenir pour vraie une affirmation quelconque. Cet assentiment est susceptible de divers degrés d’assurance, depuis la croyance vague jusqu’à la certitude absolue. Moins l’évidence rationnelle est claire, plus la volonté doit venir en appui de l’intellect pour donner l’assentiment qui constitue la croyance.

Dans un premier temps, on peut considérer qu’il n’y a pas de différence de nature entre le savoir et la croyance, mais simplement une différence de degré. On peut ainsi dire que le savoir est un type particulier de croyance : celle qui se fonde sur une évidence claire et distincte (ou une démonstration infaillible) et ne peut faire l’objet d’aucun doute. Dans un second temps, on peut distinguer nettement savoir et croyance. Alors que la simple croyance est une attitude d’adhésion et d’affirmation, qui ne dispose pas de

preuve pour établir la réalité ou la vérité de ce qu’elle affirme, le savoir, lui, repose sur une preuve.

De plus, là où la croyance peut être fausse, le savoir lui est nécessairement vrai. La distinction entre croire et savoir est alors entre ce dans quoi une vérité semble accessible et ce dans quoi aucune certitude ne paraît accessible. Dans les sciences, il y a du savoir, alors qu’en amour, il n’y a que de la croyance, aussi intense puisse-t-elle être. “[…] telle une chose m’apparaît, telle elle est pour moi, telle une chose t’apparaît à toi, telle elle est aussi pour toi”. La vérité serait donc individuelle pour Protagoras et relative à chacun. Cela veut donc dire qu’il n’y a pas de vérité absolue car les choses ne peuvent pas être atteint dans leur être mais plus dans le paraitre.

De plus, la vérité qui serait individuelle dépendrait de comment je la perçois qui créerai chez moi cette idée ou conviction. Si la vérité est la conviction personnelle de celui qui la pense, alors toutes les convictions sont vraies donc tout le monde a raison. Il n’y a alors plus de différence entre le vrai et le faux : on a alors l’indifférence car tout est égal. Il serait alors impossible de vérifier une vérité en tant que tel puisqu’elle est différente pour chacun et il ne peut y avoir de “norme” de vérité ou un système comme dans les mathématiques ou l’on peut selon une logique démontrer une vérité.

La démonstration a des limites puisqu’on ne peut pas tout démontrer. On a la preuve avec les axiomes. Les axiomes sont des vérités indémontrables qui doivent être admises comme vraies. Le cartésianisme(un courant philosophique qui se réclame des principes et des thèses de la pensée de Descartes.) souligne que ces axiomes sont connus par l’esprit immédiatement.  Les axiomes sont les principes les plus élémentaires d’une théorie donc ils n’ont pas besoin d’être démontrés.

“Les principes se sentent, les propositions se concluent et le tout avec certitude quoique par différentes voies – et il est aussi inutile et aussi ridicule que la raison demande au cœur des preuves de ses premiers principes pour vouloir y consentir, qu’il serait ridicule que le cœur demandât à la raison un sentiment de toutes les propositions qu’elle démontre pour vouloir les recevoir.”

Selon Blaise Pascal, il y a 2 voies distinctes dans l’accès à la vérité. Premièrement, il y a le cœur, qui fournit les premiers principes puis la raison qui démontre des propositions à partir des principes établis par l’intuition du cœur. Ces deux voies garantissent la certitude des propositions et donc leur véracité. Elles ne sont pas vérifiables, parce que si elles l’étaient, toutes les connaissances qui en sortent seraient obsolètes. Car comme elles sont indubitables elles ne demandent pas à être vérifiées sinon elles remettraient en cause nos certitudes. De là nous pouvons répondre que oui, il y a des vérités invérifiables, cf. les principes de Leibniz, «vérités innées» (Nouveaux essais), points de départ de tous nos raisonnements.