Le terrorisme est un produit social historique

PREMIERE PARTIE : HISTORIQUE

I – HISTORIQUE DU TERRORISME

Le terrorisme est un produit social historique. Même si ses origines restent mitigées en fonction des auteurs et des historiens qui se sont intéressés au phénomène, il reste cependant certain que le terrorisme est apparu comme une forme de continuation du dialogue dans les sociétés humaines par l’emploi de la terreur.
Dans la Rome antique, les nationalistes et intransigeants Zélotes lors de leurs révoltes contre les recensements effectués en vue de prélever l’impôt, usaient d’assassinats et de tactiques terroristes contre le pouvoir romain et même contre ceux des leurs jugés trop conciliants avec les autorités en place.
De même, au 11ème siècle, la secte des Hashashines, (les « Assassins »), précurseur des Djihadistes contemporains, organisait des attentats suicides contre les chefs de l’administration politique et militaire de l’empire turc.
Au 13ème siècle, l’Eglise catholique dogmatique livra une chasse aux hérétiques. Elle désigna des inquisiteurs tout-puissants qui terrorisaient les suspects en les soumettant à La Question. La Question consistait en un interrogatoire musclé des personnes soupçonnées et/ou dénoncées par leur entourage. Les sévices subis en l’occurrence pouvant aller des positions corporelles atroces jusqu’à la décapitation ou la mise au bûcher.
Au 16ème siècle, intervint la Réforme au sein de l’Eglise Catholique. Cette Eglise institutionnelle connaissait pour la première fois, l’expérience du pluralisme conflictuel religieux, avec la naissance de l’Eglise Protestante. Dès lors, l’avènement d’une autre compréhension de la relation de l’homme avec Dieu provoquera plus tard en Irlande des affrontements entre groupes protestants et catholiques, affrontements qui feront une large part à une terreur fratricide.
Aux Etats-Unis d’Amérique, la conquête du Far West sera également entachée de violences et de pratiques terroristes. Les populations autochtones composées principalement d’Indiens payeront les frais de l’avidité des colons à disposer de vastes terres et des richesses naturelles. Même l’occupant anglais ne sera pas épargné des actes terroristes.
Ce rappel historique loin d’être exhaustif, montre très clairement que l’histoire des sociétés humaines est bien chargée d’exemples de terreur et de pratiques terroristes.

En ce qui concerne le mot « terrorisme », il apparait pour la première fois, sous le régime politique de la Terreur, au cours de la Révolution française de 1789. L’alliance entre le Tiers Etat, les ouvriers et la paysannerie se montrera impitoyable vis-à-vis d’une aristocratie désignée comme l’oppresseur du peuple travailleur et producteur de richesses. Le diktat des partisans de la Terreur s’érige en mode d’exercice du pouvoir d’Etat et la guillotine

tournera à plein régime, décapitant les contre-révolutionnaires qui sont exécutés dans le meilleur des cas, après des jugements de tribunaux populaires. A cette époque donc, le terrorisme apparait comme un moyen d’action du pouvoir d’Etat pour se défendre et défendre les intérêts du peuple.
Mais le mot terrorisme va évoluer au fil du temps pour désigner et caractériser à partir du 19ème siècle, des actions contre l’Etat, le pouvoir en place, ses autorités et ses symboles. On assiste à la naissance d’organisations antigouvernementales :
– Groupes nationalistes pro-impériaux au Japon dans les années 1868 ;
– Ku Klux Klan dans le Sud des Etats-Unis ;
– Mouvement nihiliste en Russie ;
– Jugantar en Inde britannique ;
– Comitadjilik en Arménie dans les Balkans ;
– ORIM – Organisation Révolutionnaire Macédonienne – à Zagreb en Croatie.
Le vingtième siècle restera également marqué par ce genre de terrorisme nationaliste qui a conduit à l’assassinat de l’archiduc héritier François-Ferdinand, perpétré à Sarajevo en 1914 par un étudiant nationaliste serbe et qui provoquera la Première Guerre Mondiale.
Le terrorisme a été un mode d’action privilégié du communisme ainsi que du fascisme entre la première et la deuxième guerre mondiale. Des théoriciens de gauche comme Georges Sorel, journaliste français et le soviétique Léon Trotski dont les idées s’inspiraient intimement de la violence et du terrorisme ont largement influencé ces deux systèmes politiques.

Au moyen Orient, le Haganah, l’organisation militaire sioniste souterraine entre 1920 et 1948 connait des dissensions internes qui donnent naissance à une organisation terroriste : l’Irgun Zvai Leumi – se traduit par Organisation Militaire Nationale et se dénomme Etzel en hébreu- Ce mouvement constitue la branche armée de la mouvance sioniste d’extrême droite et perpétue des actes terroristes contre les arabes de Palestine qui essayaient de s’opposer à l’implantation de l’Etat juif. L’action d’Etzel sera appuyée par les LEHI (Lohamei Herut Yisrael : les Combattants pour la liberté d’Israël), aussi connus comme le groupe Stern qui comptera des personnalités comme le futur premier ministre israélien Yitzhak Shamir parmi ses membres. Ce dernier groupe porte la responsabilité de l’attentat du 17 septembre 1948 qui tua le comte Folke Bernadotte de la République de Suède, alors médiateur de l’Organisation des Nations-Unies pour la Palestine à l’UNTSO (United Nations Truce Surveillance Organisation – Mission des Nations Unies pour la surveillance de la trêve au Moyen-Orient).

Au milieu des années 1960, à la faveur du conflit ouvert entre les pays arabes et Israël au Proche-Orient, se développe la plus spectaculaire manifestation du terrorisme. Elle est galvanisée par les progrès de la technologie, la mise au point et la diffusion d’armes d’assauts facilement transportables et opérationnelles, ainsi que par les médias, dorénavant omniprésents sur les lieux des crimes.
En réaction au terrorisme des groupes de l’extrême droite israélienne, leurs adversaires arabes font un usage beaucoup plus systématique du terrorisme. Ainsi, l’expulsion des guérilleros palestiniens de Jordanie, en septembre 1970, donne lieu à la création d’une armée terroriste extrémiste appelée Septembre noir. Par ailleurs, l’Organisation de libération de la Palestine (OLP) mène des opérations de commandos et des actions terroristes (prises d’otages, détournements d’avions).

En Allemagne de l’Ouest dans les années 1970, la « bande à Baader », autre appellation de la Fraction Armée Rouge (FAR), signe plusieurs attaques contre les installations militaires américaines. A son palmarès figurent également l’enlèvement et l’assassinat du grand industriel Hans Martin Schleyer en 1977, ainsi que le détournement d’un avion de ligne de la Lufthansa à Mogadiscio, en Somalie. Cette dernière action visait à faire pression pour que les deux dirigeants de l’organisation que sont Andreas Baader et Gudrun Ensslin soient libérés de prison. Dès lors, une étroite collaboration s’établie entre les membres de la FAR et les palestiniens ; cette collusion se rendra responsable en 1972 de l’assassinat de onze athlètes israéliens par un commando de Septembre noir, lors des jeux Olympiques de Munich en République Fédérale d’Allemagne.

La puissance des terroristes atteindra un extrémum en 1978 en Italie. La tradition anarchiste du pays alliée à son instabilité politique créera les conditions favorables à l’émergence d’une criminalité mafieuse ainsi qu’à la prospérité de groupes terroristes tels les Brigades Rouges dont un des hauts faits sera l’enlèvement et l’assassinat de l’ancien président du Conseil Aldo Moro.
La France ne sera pas non plus épargnée par la vague terroriste. Au terrorisme autonomiste ou indépendantiste de groupuscules comme le Front de Libération de la Bretagne, les brigades révolutionnaires corses ou de l’ETA au Pays Basque, s’ajoutent d’autres groupuscules d’extrême gauche comme Action Directe. Les membres d’Action Directe se réclament d’une idéologie anti impérialiste et s’attaquent aux symboles du capital financier principalement américain, en posant des bombes dans les institutions représentant l’ordre et le pouvoir.

Avec les attentats du 11 septembre 2001, un tournant dans l’histoire du terrorisme et du monde est amorcé. L’ampleur des dégâts humains et matériels, l’impact politique et psychologique de l’action ainsi que la résonance mondiale de l’événement ont prévalu au déclenchement par les Etats-Unis d’Amérique, de la guerre à l’échelle planétaire contre le terrorisme.

Mais en fait, de quelle définition disposons-nous du terrorisme ?

En d’autres termes, le terrorisme est l\’emploi délibéré de la violence (attentats, assassinats, enlèvements, etc.) à des fins politiques, de telle sorte que leur retentissement psychologique – terreur et peur – dépasse largement le cercle des victimes directes pour frapper massivement l\’opinion publique concernée.

Partant, qu’en est-il des causes du terrorisme ?

III – CAUSES DU TERRORISME

Le terrorisme est causé par des motivations qui se rapportent à la lutte entre les courants idéologiques, au non respect des droits politiques, à la dégradation des conditions socioculturelles aggravées par les effets pervers de la mondialisation.

3.1 Les causes idéologiques
Les causes idéologiques du terrorisme trouvent leurs racines dans l’opposition qui existe entre le capitalisme (le libéralisme) et le communisme. Les adeptes du premier considérant ceux du second d’objecteurs de conscience et d’athées, cependant que ces derniers prennent les premiers pour des endormeurs de conscience. L’extrémisme devient une raison pour combattre ceux d’en face. Ainsi naquirent les mouvements d’extrême droite et d’extrême gauche qui vont ériger le terrorisme en mode de combat.
En ce qui concerne les mouvements d’extrême gauche, ils seront particulièrement actifs en Allemagne (Fraction Armée Rouge), en Italie (les Brigades Rouges), en France (Action Directe) et en Belgique (Cellules Communistes Combattantes). Des pays comme la Turquie et la Grèce font toujours face de nos jours, à l’action du terrorisme de l\’extrême gauche. On notera également l\’influence que continuent d\’exercer les idéologies d\’extrême gauche sur les mouvements révolutionnaires dans le monde. Par exemple, le mouvement du Sentier Lumineux au Pérou, se considère comme le véritable héritier du maoïsme et ambitionne d\’être à l\’avant garde de l\’évolution communiste en Amérique latine. Malgré les revers qu\’il a subis, le mouvement continue de présenter une menace sérieuse pour la vie et le bien-être social et économique de nombreuses régions du pays et sert de modèle à d\’autres groupes violents de pays voisins. Par ailleurs, en décidant de soutenir les luttes anti coloniales et les mouvements de libération nationale, l’ex bloc socialiste avec à sa tête la défunte Union Soviétique, en dépit du mouvement des non alignés, avait rallié à sa cause dans le cadre de la guerre froide, plusieurs pays du continent africain, parmi lesquels de nombreux pays de l’Afrique subsaharienne. Les multiples guerres de libération ont vu le soutien agissant des camarades de lutte de l’Internationale Communiste, soit officiellement entre gouvernements ou de manière beaucoup plus voilée à travers des organisations ou partis politiques amis. Aussi a-t-on connu le développement de la lutte de guérilla dont les modes opératoires ont fait largement appel au terrorisme.
Quant à la menace de violence de l\’extrême droite, elle existe dans de nombreux pays depuis plusieurs décennies. Des groupes néo- fascistes et néo-nazis sont actifs aux États-Unis, au Canada, en Afrique du Sud, en Amérique Centrale et en Amérique du Sud ainsi qu\’en Europe et dans l\’ancienne Union Soviétique. En Afrique du Sud, des groupes extrémistes comme l\’Afrikaner Weerstands beweging (AWB) constituent toujours une menace pour le pays et la région.
En Europe, le problème de la réapparition de la violence d\’extrême droite est devenu, ces dernières années, une menace beaucoup plus sérieuse que la violence motivée par l\’idéologie de l\’extrême gauche. En Allemagne, par exemple, le désenchantement général à l\’égard des principaux partis politiques, les pressions exercées sur l\’économie par la réunification, les taux de chômage élevés et l\’arrivée de centaines de milliers d\’immigrants ont créé un climat dans lequel l\’extrémisme violent de droite est florissant. En 1992 environ 2 000 attentats perpétrés par des groupes d\’extrême droite ont fait 17 morts et plus de 2 000 blessés.
Il est probable que les attentats violents motivés par l\’idéologie augmentent au cours des prochaines années, dans de nombreux pays où les effets pervers de la mondialisation exacerberont la dureté des conditions socioéconomiques de la vie de tous les jours.

Un autre aspect des causes idéologiques se retrouve dans la résistance contre l\’oppression religieuse. Un exemple de terrorisme impliquant la cause de l\’oppression religieuse existe au Pakistan, où certains très petits groupes terroristes (Musulmans Sunnites et Chiites) commettent de manière régulière des attaques terroristes l\’un contre l\’autre pour des raisons d\’intolérance mutuelle et en réponse à l\’intolérance. Certains de ces groupes attaquent aussi des Chrétiens ainsi que les derniers Hindous restés au Pakistan (qui sont dans une trop faible position pour pouvoir se défendre ou répondre). Sur le continent africain et en Afrique subsaharienne, au Nigeria et en Côte d’Ivoire, des confréries ou communautés musulmanes et chrétiennes s’affrontent de manière ouverte ou voilée et sous divers prétextes.

Mais si les orientations idéologiques sont de nature à expliquer le recours au terrorisme interne ou externe pour revendiquer certains droits, les motivations politiques viennent accroître la propagation de ce phénomène.

3.2 Les causes politiques
Les convictions politiques constituent les motifs souvent allégués par les terroristes pour mener les actions contre leurs pays d’origine ou à l’étranger.
Pour une meilleure illustration des causes politiques du terrorisme, il y a lieu d’examiner quelques exemples à travers le monde.
En Europe de l\’Ouest, c\’est le séparatisme historique des républicains irlandais d\’Irlande du Nord et des nationalistes basques d\’Espagne qui a engendré le terrorisme le plus meurtrier et le plus prolongé. Ces groupes, au nom de leurs revendications politiques, ont perpétré un grand nombre d’attentats terroristes contre les institutions et symboles étatiques.
Dans l\’ancienne Union Soviétique et en Europe de l\’Est, la révocation des dictatures communistes a donné libre cours aux nombreuses rivalités et haines ethniques qui couvaient. La tentative de l\’armée russe pour réprimer le séparatisme tchétchène a révélé de manière dramatique que la Fédération russe elle-même regorge de groupes ethniques qui rejettent avec acharnement le droit de Moscou de les gouverner.
C\’est en Afrique qu\’on trouve les exemples les plus tragiques de conflits s\’appuyant sur le terrorisme. Au Rwanda, les affrontements ont pris l\’ampleur d\’un génocide qui a entraîné la fuite de centaines de milliers de personnes ou leur massacre aux mains de tribus ennemies. Les guerres ethniques de ce genre sont habituellement menées par des milices armées et sont caractérisées par une brutalité terroriste extrême à l\’égard de la population civile.
Les conflits ethniques sont la principale motivation de la violence politique en cette période de l\’après-guerre froide. En effet, la méfiance démesurée qui conduit certains groupes à la suspicion et à s’auto armer au nom de la légitime défense, pousse ceux d’en face à voir dans ces comportements une menace à leur propre sécurité. Ces derniers commencent alors à renforcer leur propre force de frappe, ce qui déclenche inéluctablement le conflit que chaque partie cherchait à éviter. Le débordement international de ces conflits sous la forme d\’attentats terroristes dans d\’autres pays variera selon les circonstances politiques et stratégiques.
Aussi, lorsqu\’un groupe ethnique juge sa situation désespérée, dans des circonstances où il risque d\’être supprimé ou délogé de son territoire, il est fort probable qu’il se livre à une campagne terroriste. Les conflits ethniques dans les Balkans ont donné lieu à d’importants actes terroristes qui ont débordé les frontières de la péninsule.
Les extrémistes sikhs, tamouls et du cachemire ont aussi mis sur pied une importante infrastructure de terrorisme et d\’appui logistique de celui-ci à l\’étranger.
Pour ce qui est du Moyen Orient, il est considéré comme la zone qui a occasionné le débordement de violence terroriste le plus important et le plus impitoyable depuis 1968. Cette région demeure la plus dangereuse source de défis terroristes. La majorité de ces actes de terrorisme est vraisemblablement commise en Israël et en Cisjordanie. Mais plusieurs attentats sont perpétrés ailleurs contre des cibles israélienne et juive, et les pertes de vie massives qu\’ils entraînent, démontrent combien leurs auteurs sont prédisposés à recourir au terrorisme pour s’opposer à la politique israélienne dans la région.
En outre, il existe, dans plusieurs pays, des groupes de fondamentalistes islamiques extrémistes, qui sont prêts à faire une guerre sainte aux régimes arabes pro-occidentaux dans le but de les remplacer par des républiques islamiques. Comme l’ont manifesté le Front islamique du salut (FIS) et le Groupe islamique armé (GIA) en Algérie ainsi que le Groupe islamique en Égypte. Cependant, les groupes fondamentalistes islamiques ne menacent pas uniquement les régimes en place dans le monde musulman mais englobent souvent parmi leurs cibles les Occidentaux vivant dans leurs pays. En Algérie, par exemple, les militants du GIA s\’attaquaient délibérément aux citoyens et employés occidentaux parce que, selon eux, les pays d’origines de ces citoyens appuient et aident secrètement le régime algérien.
Par ailleurs, l\’Iraq reste le plus dangereux des Etats de la région en matière de la montée en puissance de ce fléau à cause de l’intervention américaine dans ce pays. Selon les auteurs des opérations terroristes menées contre les américains, la présence de ces derniers sur leur territoire et dans toute la région est non seulement injustifiable mais injuste et vise à s’accaparer des richesses pétrolières et à soutenir inconditionnellement l’Etat hébreux.
Au lendemain des événements du 11 septembre 2001, la Maison Blanche a choisi « la lutte contre le terrorisme » comme étant le principe majeur de sa politique étrangère, tout en oubliant que cette politique est accusée d\’être la cause principale du terrorisme. Les services de renseignement américains ont participé, au nom de la «sécurité nationale américaine», au renversement de régimes réformateurs et démocratiques issus du suffrage universel au Guatemala, en République Dominicaine, au Brésil, au Chili, en Grèce, en Indonésie, en Bolivie, en Haïti. Ces mêmes services américains ont contribué à des actions de déstabilisation, contre des gouvernements légitimes à Cuba, en Angola, au Mozambique , en Ethiopie , au Cambodge, au Timor Oriental, au Liban, au Pérou, en République Démocratique du Congo (ex- Zaïre) , au Yémen du sud , aux Iles Fidji, etc. Parallèlement, les Etats-Unis ont, depuis la fin de la seconde guerre mondiale, mené des interventions militaires directes contre le Viêt-Nam, le Laos, le Cambodge, le Liban, le Panama, la Libye, la Somalie, l\’Irak.
La liste est appelée, aujourd\’hui encore, à s\’allonger.
Les Etats-Unis se créent sans relâche des « ennemis », qu\’ils diabolisent à l\’extrême pour justifier leurs ingérences militaires, leurs invasions, les coups d\’Etat qu\’ils fomentent, les guerres civiles qu\’ils déchaînent. Peu importe que le pays proclamé ennemi soit réformiste, démocrate, socialiste, communiste ou islamiste ; seuls les intérêts américains priment.
Quelle que soit l\’administration en place, démocrate ou républicaine, le locataire de la maison blanche poursuit la même politique étrangère basée sur la politique de «deux poids, deux mesures».
Cette attitude est illustrée dans le conflit historique et éternel du Proche-Orient. Elle se retrouve également au niveau de l’acquisition de la technologie nucléaire.
De telles inégalités créent donc une frustration qui encourage et favorise à son tour l\’extrémisme ainsi que le fanatisme, et par voie de conséquence le terrorisme.
Les Etats-Unis interviennent partout dans le monde pour préserver leurs intérêts nationaux et cela même au prix du soutien aux pires dictatures : Le shah d\’Iran, Saddam Hussein, les Talibans, etc. Ils vont parfois jusqu’à ignorer les instances internationales et les règles immuables du droit international. A ce sujet, il peut être cité la guerre « unilatérale » contre l\’Iraq au printemps 2003 et le refus de signer un certain nombre de conventions internationales. Les américains font de la guerre, une politique étrangère de leur pays. Cette politique a eu un impact direct et indirect, dans le déclenchement de plusieurs guerres qu\’a connues le monde depuis 1985 jusqu\’à nos jours dans des pays comme le Nicaragua, le Liban, l’Afghanistan, la Bosnie, le Yémen, le Soudan, la Somalie, l’Iran, l’Iraq, etc.
Finalement, le 11 septembre 2001 permettra à l\’administration américaine de mettre en avant sa politique guerrière. Faisant tout d\’abord le ménage en Afghanistan, elle parlait déjà de l\’Axe du Mal (antérieurement les Etats Voyous), qui comprenait : l\’Iraq, l\’Iran et la Corée du Nord, comme étant les ennemis du peuple américain, qu\’il fallait abattre. A cet effet, le concept d\’« une guerre préventive » est introduit, pour mener la guerre contre l\’Iraq en 2003.
Une telle politique provoque la haine et le ressentiment au sein des peuples pauvres contre les Etats-Unis qui poussent, en fin de compte, au terrorisme.

3.3 Les causes socio culturelles
Le terrorisme de l\’après guerre froide, qui s’est fortement multiplié à cause de la pauvreté, du chômage, de l\’analphabétisme, de l\’injustice et de l\’humiliation trouve dans la mondialisation tous les moyens technologiques dont il a besoin, pour se concrétiser et s\’étendre.

3.3.1 Les causes liées à la misère
La misère et le désespoir des peuples qui sont pacifiques par essence, les conduisent à mener des actions et à développer des réactions qui peuvent être sanglantes et même culminer à des attentats terroristes.
La pauvreté est un phénomène historique qui est communément vécu et toléré dans toutes les sociétés humaines. Mais son évolution exponentielle et à contre courant des progrès scientifiques et technologiques ne trouve d’explication nulle part ailleurs que dans l’égoïsme des hommes. Plus de la moitié de la population mondiale vit avec moins de deux dollars par jour. Aussi, sur une population active mondiale de 4 milliards de personnes, on trouve 200 millions qui sont au chômage complet et plus d’un milliard d’autres personnes qui sont sous-employées. Les sociétés transnationales (STN) participent directement et indirectement à la perpétuation de ce phénomène. C\’est ainsi qu\’au cours des années 90, les bénéfices des deux cents premières STN ont augmenté de 75% entre 1990 et 1995 sans création d\’emplois.
Dans le monde entier, il y a environ 815 millions de personnes touchées par la famine dont 777 millions d\’entre elles se trouvent dans les pays sous développés.
En plus, selon l\’UNICEF, il y a plus de 130 millions d\’enfants d\’âge scolarisable qui ne connaissent pas le chemin de l’école et plus de 30.000 enfants dans le monde qui sont armés dans les guerres civiles. Parallèlement, près de 250 millions d\’enfants de moins de 14 ans travaillent, souvent, dans des conditions dangereuses ou malsaines, pour permettre à leurs familles de survivre. Ils constituent tous ainsi, des cibles vulnérables au recrutement par les groupes terroristes.
De surcroît, la mondialisation enrichit les riches et appauvrit les pauvres. Le fossé entre les gagnants et les perdants de cette mondialisation a tendance à se creuser. A ce titre, les Etats-Unis qui symbolisent le mieux la mondialisation, sont confrontés à un processus d\’accentuation exceptionnelle des inégalités qui se sont fortement accrues depuis la fin des années 80. De fait, 10% des américains détiennent 50% des revenus américains. Le creusement des inégalités se transmet à présent, d\’une génération à la suivante en fonction du milieu social, ce qui est source de stress, d\’humiliation et d\’agressivité permanente. Cela entraîne enfin de compte, le désespoir et une perte des raisons de vivre.

3.3.2 Les causes liées à l’injustice
Sur une des nombreuses banderoles que brandissaient des manifestants excédés par l’accroissement du fossé qui les séparait au fil des jours de leurs gouvernants, il était donné de lire ce qui suit : « les uns mangent, les autres regardent ; ainsi naissent les révolutions ».
Ce cri de cœur qui traduit très clairement le phénomène de l’injustice sociale dénonce en même temps, une des causes les plus avérées du terrorisme.
D’aucuns pourraient avancer que tout comme la violence, l’injustice a toujours fait partie intégrante de notre nature humaine. Mais il convient d’inviter ces simples d’esprit à faire une distinction entre l’instinct naturel de conservation de la vie qui existe chez tout être vivant d’une part et d’autre part le fait que le système économique libéral et le modèle de civilisation qu’il véhicule sécrètent une injustice criarde et impitoyable.
Les occidentaux allèguent qu’une remarquable amélioration des conditions de vie a été notable avec l’essor du capitalisme. Ils avancent que la mécanisation grâce à la machine à vapeur, la découverte de l’électricité, la télématique et l’informatique ont été à l’origine de l’accroissement de la production alimentaire, de l’amélioration des conditions d’hygiène, ce qui expliquerait l’évolution exponentielle de la population mondiale : « Il a fallu 2 millions d\’années pour que la terre voit son premier million d\’habitants. Puis, 6.000 ans d\’agriculture ont propulsé cette population à 250 millions. Avec l\’industrialisation, on a atteint un milliard en 1830; puis deux (2) en 1930; trois (3) en 1969, quatre (4) en 1980, et on approche les sept (7) milliards de nos jours » disent certains défenseurs.
Mais cette lecture de l’histoire de l’évolution de la communauté humaine est une vaine tentative pour cacher les terribles effets pervers de la course effrénée vers la croissance au moyen d’une exploitation tout aussi perverse des progrès technologiques.
En effet, d’un point de vue strictement économique et social, les progrès technologiques n\’ont profité en réalité, qu\’à un quart de la population mondiale. Et surtout à la haute finance. Ainsi, l’installation d\’une minoterie mécanique par un riche aristocrate peut paraitre un progrès ; cependant, celle-ci tue tous les moulins de la région. De même, de nos jours, le système commercial des grandes surfaces a tué les petits magasins, qui étaient sources de réelles relations humaines. Quant à la fusion des grandes firmes internationales, elle jette dans les rues, d’innombrables travailleurs qui n’ont plus dans la plupart des cas que le trafic illicite et la criminalité pour survivre.
La société de consommation exploite dangereusement les ressources de la terre : en 30 ans (de 1950 à 1980), il a été consommé la moitié du charbon extrait depuis huit siècles. Idem pour le pétrole : la moitié en dix ans ! Quant aux forêts : un tiers des arbres du monde a été rasé de 1900 à 1950. Chaque édition du dimanche du New York Times (qui contient 80 % de publicité !) nécessite l\’abattage de 15 hectares de forêts canadiennes ! Un gaspillage qui donne à méditer.
Qu’en est-il des pays du Sud ? Ces pays payent leur début de modernisation par un épouvantable endettement et leurs populations restent affamées et de plus en plus exploitées : en 1960, un paysan africain pouvait acheter une charrue à traction asine pour la valeur de 14 sacs de sorgho ou de riz ; en 1968 soit 8 ans après, il lui en fallait 39 !
Finalement, la recherche d\’une croissance sans fin marque lourdement les conditions morales de l\’humanité : Dans nos sociétés où un grand nombre est privé de tout ce dont ces systèmes d\’étalages l\’appellent à jouir, la violence devient la loi des individus, des groupes et des peuples. A cet égard, comment ne pas citer le Brigadier général Achraf RIFI, Directeur général des Forces de sécurité intérieure au Liban. Interpellé pour dire à cœur ouvert quel était l’origine du terrorisme selon lui, il répondit ceci : « Sans hésiter, je réponds l\’injustice. Elle a toujours précédé la violence. Avant l\’irruption d\’une campagne terroriste, on constate immanquablement une injustice majeure cause de la colère d\’une couche de la population. Tant que nous ne parviendrons pas à asseoir un minimum de justice sur la planète, nous resterons confrontés à des vagues de terrorisme. C\’est à la lumière de cette réflexion qu\’il faut envisager ce qui se passe en Palestine. Pour nous, dans le monde arabe, la situation dans cette région apparaît comme le cas le plus flagrant d\’une injustice fondamentale et intolérable ».

3.3.3 L\’humiliation
Le capitalisme néolibéral prétend assurer l’émancipation des peuples en instaurant un système économique qui garantit non seulement une saine émulation de la libre entreprise mais aussi une compétition qui stimule la production de richesses. En outre, cette forme de société entend promouvoir les droits de l’homme et la démocratie.
Malheureusement, les faits de l’histoire apportent un démenti à ces promesses illusoires de bonheur. Pire, le mode de production capitaliste, en basant son système moteur sur la production du capital et la recherche éperdue des plus grands profits, fini par rentrer dans un engrenage de contradictions et de crises dont les résultats sont l’exploitation et la paupérisation des travailleurs, l’oppression et l’humiliation des peuples et des dirigeants des pays de la périphérie, principalement africains.
L’exemple le plus édifiant à ce sujet est donné par le FMI (Fonds Monétaire International). Cet organisme, particulièrement puissant, dicte aux pays pauvres les politiques à suivre à travers les plans d\’ajustements structurels et l’imposition de certaines réformes inadaptées à la réalité de ces Etats. Cet esprit coercitif et contraignant, qui tend à imposer et à dicter aux autres les règles de comportement, d’administration et de conduite, ne peut qu’entraîner un sentiment d’humiliation et de montée de haine à l’égard de ces attitudes hégémoniques. Ce sentiment de frustration attise chez certains, un esprit de vengeance qui se traduit dans la plupart des cas par l’exécution d’opérations terroristes comme réponse du plus faible au plus fort.
De nos jours, et après les attentats du 11 septembre 2001, cet embrigadement s\’est fortement accentué. On assiste à un changement de paradigme : au couple démocratie-marché se substitue le couple sécurité-marché. Cette dérive est extrêmement inquiétante car, allant à l\’encontre du « mouvement social », elle peut permettre de réprimer toutes les ambitions de contestation du système capitaliste néolibéral.
Alors, un monde se dessine à l’horizon ; un monde dans lequel la démocratie et ses valeurs tendent à devenir de simples outils verbaux au service d\’un système hégémonique qui érige en priorité des priorités, la pérennité du système en place.

3.3.4 La désagrégation des valeurs
Il est constaté de nos jours, une absence totale de projets culturels tant les rapports marchands imposés par le capital ont gagné toutes les activités humaines. Le monde tend de plus en plus vers l’instauration d’un modèle unique de civilisation. Il s’agit de «l\’américan way of life» des sociétés contemporaines, caractérisées, par exemple, par l\’adoption d\’une sous culture anglo-saxonne et une soumission insidieuse à la langue anglaise devenue langue du business et des technologies.
Sur le plan culturel, la mondialisation se présente donc, comme étant une nouvelle forme de colonisation qui vise à imposer la culture occidentale et à marginaliser les cultures traditionnelles des autres, ce qui engendre un désarroi, une perte de repères favorisant certaines poussées de violence intégriste et la montée des courants qui appellent à un retour identitaire et au respect des spécificités culturelles. La mondialisation s\’est accompagnée, non seulement d\’une paupérisation, mais aussi du viol des cultures, et même parfois de la destruction de « l\’histoire des peuples » poussant ceux-ci à la révolte.
En plus, au début des années 90, des amalgames ont été faits sur les plans médiatique et politique, pour assimiler certaines cultures à la violence et au terrorisme. L\’islam est plus particulièrement visé, même si l\’on se cache parfois derrière l’intégrisme ou l’islamisme. La cause de cette phobie est due à l\’ignorance et à l\’absence de communication culturelle. Le député Geert Wilders, un parlementaire néerlandais, fondateur du PVV (Partij voor de Vrijheid – troisième force politique du pays depuis les élections de juin 2010) en est une parfaite illustration. Il s’est fait notamment connaitre en comparant le Coran au « Mein Kampf » d\’Adolf Hitler et demandé son interdiction aux Pays-Bas, sans parler de son court-métrage anti-islamique « Fitna » diffusé sur internet en 2008. Récemment en visite dans l’Etat hébreux, il a appelé les dirigeants israéliens à ne pas échanger les territoires occupés contre une paix avec les Palestiniens, car selon lui « le conflit au Moyen-Orient ne porte pas sur le territoire et les frontières, mais sur l\’opposition entre le Jihad islamique et la liberté occidentale ».
Même dans les pays riches, l\’exclusion et le chômage engendrent un délitement des valeurs et des raisons de vivre. Cela se traduit notamment par la banalisation, la corruption et la montée de la délinquance, de la violence et de la répression.
Les valeurs culturelles sont donc entrain de se décomposer à cause de phénomènes sociaux tels que : la drogue, les sectes ou divers fondamentalismes, ce qui constitue des viviers pour le terrorisme. Dans le même temps, les frontières entre le moral et l\’immoral, le légitime et l\’illégitime disparaissent.

Cependant, notre tour d’horizon serait incomplet si l’on ne mentionnait pas le rôle catalyseur de la technologie de pointe et de l\’argent de l\’illégalité dans l’expansion du terrorisme.

3.3.5 Les engrais du terrorisme : technologie et argent sale
Les groupes terroristes trouvent dans le printemps technologique contemporain, les outils et moyens de travail pour l’exécution de leurs opérations. La technologie de pointe offre aux terroristes des outils comme les ordinateurs, les téléphones par satellite, l’Internet et d\’autres produits modernes pour mieux organiser la communication et la conduite de leurs actions conformément aux plans préétablis. Ils s\’en servent pour coordonner et appuyer leurs actions, récolter de l\’argent, diffuser l\’information et la propagande.
Le terrorisme dispose ainsi, de moyens d\’opérer à l\’abri des mesures anti-terroristes traditionnelles et de se développer sans être détecté, ce qui le rend plus dangereux et plus difficile à combattre. Pire, cette technologie n\’a pas seulement facilité les activités terroristes ; elle a créé de nouvelles formes, plus dangereuses, de terrorisme. Celles par exemple, du cyber terrorisme et du terrorisme qui utilise les armes de destruction massive (ADM).
Aussi, certaines organisations terroristes multinationales ont généralement plusieurs sources de financement et de soutien logistique et s\’autofinancent, souvent, par des activités criminelles. Dans leurs réseaux de soutien figurent aussi des entreprises commerciales, des associations et des organisations non gouvernementales à caractère légitime. Le besoin de l\’argent pour le terrorisme s\’explique par plusieurs raisons. A titre d\’exemple, il faut payer les agents, acheter les armes et financer les opérations. La mondialisation joue un rôle primordial dans la satisfaction de ce besoin grâce aux systèmes mafieux qui permettent au terrorisme de prospérer.
Ainsi donc, le terrorisme peut tirer ses racines dans des motivations politiques, des considérations idéologiques et des changements aussi bien socio-économiques que culturels engendrés à la fois par les effets pervers de la mondialisation et l’hégémonisme des nations développés. Concomitamment, la misère des populations des pays pauvres qui les rend très vulnérables et les prédispose à se vouer à n’importe quel Saint, sera exploitée pour alimenter le terrorisme.