Des entreprises dans le secteur agricole marocain

Il est nécessaire de faire un rappel de la définition de la RSE et ses quatre aspects (environnemental, économique, social et civique).
L’aspect environnemental et la durabilité de l’action de l’entreprise
Des initiatives existent concernant l’impact environnemental des entreprises. Par exemple, des projets visant à recycler le plastique noir utilisé dans la culture des fruits rouges ainsi que le financement par le Crédit Agricole au Maroc de projets à initiative environnementale (www.creditagricole.ma).
L’aspect économique et la gouvernance de l’entreprise
Dans le cadre de l’appel d’offres lancé par le ministère de l’Agriculture relatif aux patrimoines fonciers de la Sodea-Sogeta (privatisation de la gestion), la sélection des dossiers des entreprises s’est faite sur la base de l’investissement la création d’emplois (20%) et la cohérence technique, économique et financière.
La cession de ces terres au privé a permis dans certains cas la création de l’emploi, la priorisation de la main d’œuvre locale et une meilleure reddition de compte par le secteur privé qui doit produire un rapport annuel sur les investissements réalisés et les emplois créés.
Les participants du secteur privé ont identifié quelques contraintes liées à l’ambiguïté du rôle des autorités locales dans le suivi et le contrôle de ce partenariat public/privé.
L’aspect social et les conditions de travail
La contractualisation : il existe des contraintes de législation à de nombreux niveaux : saisonnalité, gouvernance foncière, et il en résulte une relation difficile avec les autorités locales. La déclaration à la CNSS pose également problème puisque certains salariés doivent renoncer à bénéficier du RAMED et perdre leur couverture sociale hors des périodes travaillées. Le cas de la cotisation pendant 312 jours est seulement valable pour les permanents. Une bonne partie des saisonniers ne bénéficient alors pas de la retraire puisqu’ils n’atteignent pas les points requis.
La protection sociale : la loi marocaine prévoit des dispositions spéciales pour chaque régime de protection sociale. Toutefois, l’ouverture de droit aux prestations AMO est conditionnée par la justification de 54 jours déclarés continus ou discontinus, dont les cotisations sont payées, pendant une période de 6 mois. La condition saisonnière des ouvriers ne leur permettent pas de remplir ce dernier critère malgré les déclarations de l’employeur et impactent leur relation de confiance avec ce dernier

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L’aspect civique et le contexte dans lequel évolue l’entreprise
Dans la rubrique des aspects civiques que permet la RSE, certaines entreprises prennent en charge des crèches, la gestion de la rentrée scolaire, le soutien scolaire, des associations des œuvres sociales. Il existe aussi

au sein de la CGEM un label RSE qui contient également un système de gestion environnemental et social.

Recommandations

Etats des lieux Recommandations
Besoin de renforcer la compréhension de la RSE dans le secteur agricole au Maroc Chiffrer l’impact des politiques/procédures pour engager le secteur privé intéressé
Elaborer des guides et formations en RSE pour les entreprises et vulgariser les concepts pour les petits producteurs
Aspect social de la RSE : problématique de contractualisation et d’accès à la sécurité sociale Participer aux réformes législatives (Protection sociale, Retraite, saisonnalité, les politiques de RSE, accès à l’information)
Besoin de renforcement des capacités des salariés, améliorer les relations avec les représentations syndicales, promouvoir une meilleure
gouvernance de l’entreprise Elaborer des supports pédagogiques pour les femmes travailleuses et les sensibiliser à leurs droits
Campagne de sensibilisation intégrée au profit de tous les acteurs Impliquer les acteurs publics (conventions cadres)

B- La saisonnalité au Maroc et la valorisation de la main d’œuvre

Lors d’une journée d’étude organisée par l\’Association marocaine pour le développement des ressources humaines dans le secteur agricole et l\’industrie agro-alimentaire (AMDRHA), à KENITRA le 23 & 23 Mars 2018, sous le thème \”les contrats saisonniers dans le secteur agricole et agroalimentaire: entre la réalité et la règlementation en vigueur\”, Le ministre du travail et de l\’insertion professionnelle, Mohamed Yatim,a souligné, dans une allocution lue en son nom par Mohamed Sokrati, du ministère, que le développement des Ressources Humaines dans la gestion du secteur agricole et agro-alimentaire, notamment celui relatif à la cueillette des fraises et autres travaux agricoles saisonniers, nécessite une nette amélioration des conditions socioéconomiques de ces ouvriers.
Le ministère du Travail et de l’Insertion professionnelle accorde une importance particulière aux travailleurs saisonniers dans le cadre de plusieurs mesures \”sans précédent\” prises par le gouvernement dans le domaine de l\’emploi saisonnier, a dit M. Yatim, insistant sur la mise en place de mécanismes beaucoup plus adaptés aux spécificités du travail saisonnier à même d’améliorer les conditions de travail des salariés.
Pour sa part, le président de l’AMDRHA, Otman El Qacemi, a noté que le contrat de travail saisonnier, qu’il soit à durée indéterminée ou déterminée, devra se conformer plus à la réalité du travail saisonnier qui est lié aux conditions climatiques nécessitant un équilibre entre l’amélioration des conditions de travail et les revenus des salariés. MAP 24/03/2018

La définition de la saisonnalité et le cadre juridique marocain
Le secteur agricole marocain présente de nombreuses caractéristiques qui ne tiennent pas compte de son cadre juridique, telles que : la durée de la saison, les contrats saisonniers, le mode de paiement (à la quinzaine, à la tache ou au mois), les types de contrats de cotisations sociales (CDI, CDD et CDD pour des projets ne correspondent pas forcément à la réalité Agricole).
Un décret sur la saisonnalité qui fait état d’une définition juridique a été rédigé et signé au Parlement, mais ce décret n\’a pas encore été officiellement publié et n\’est pas entré en vigueur.

Le contexte du travail saisonnier
Être un ouvrier saisonnier est souvent synonyme d’instabilité et de précarité et de qualifications / compétences ne répondent pas toujours aux besoins des producteurs. Le SMAG et le SMIG ne permettent toujours pas d\’assurer un niveau de vie convenable aux travailleurs du secteur, ce qui affecte directement l\’attractivité du secteur, le recrutement, la qualité de la main-d\’œuvre et la productivité.
Les producteurs exigent de la productivité et veulent payer plus que le salaire minimum en échange
d’une garantie de productivité.

Pour les salariés saisonniers le paiement à la tâche est plus rémunérateur que le paiement à la quinzaine et la productivité est plus élevée.
La pression du chômage fait que des personnes surdiplômées occupent des postes sous qualifiés. Il manque un programme national de qualification qui réponde aux besoins du secteur tout en offrant un salaire attractif aux populations rurales, ainsi qu’un répertoire des emplois et métiers pour le secteur. Le secteur étant éclaté en filières, il est structuré par des fédérations. Il incombe alors aux ministères de tutelles ainsi qu’aux fédérations de produire ce répertoire adapté aux spécificités du secteur.
La fidélisation de la main d’œuvre et les relations avec les travailleurs saisonniers au sein des entreprises

Le manque de communication entre les producteurs, entreprises et leurs salariés (sans compter lorsque les intermédiaires font parties de la chaine de recrutement et de supervision) entraine une méconnaissance des employés de leurs droits et devoirs. Cette méconnaissance est accrue lorsque les employés sont analphabètes. Les postes de ressources humaines doivent être mieux valorisés, ainsi que les instances représentantes du personnel.
La Sécurité sociale*
La majorité des entreprises dans le secteur agricole ne déclare pas 100% de ses employés à la CNSS
Les éléments sociaux (conditions de travail et prise en compte de la main d’œuvre) ne sont pas inclus dans le Plan Maroc Vert et cette responsabilité incombe aux ministères de l’Agriculture et de l’Emploi.
La marge effectuée par les petits producteurs n’est pas suffisante pour déclarer toutes les cotisations, cependant la loi doit être respectée par tous. La démarche export ne permet également pas assez de marge aux petits producteurs.
Les systèmes de couvertures sociales sont nombreux, ne se cumulent pas et ne couvrent pas les périodes non travaillées.
Exonérer le secteur privé des cotisations de CNSS en échange d’investissement est illogique et agrandit le manque à gagner de l’Etat.
Etats des lieux Recommandations
Manque de définition de la saisonnalité et cadre juridique inadapté Elaborer une loi spécifique au secteur agricole qui adresse toutes les spécificités du secteur
Harmoniser les deux législations fiscales et agricoles
Encourager les parties prenantes à engager la négociation collective autour de la saisonnalité (médecin du travail, IRP…) et développer la culture du champ conventionnel dans les entreprises agricoles
Elaborer une charte d’éthique entre les agriculteurs en ce qui concerne le recrutement de la main d’œuvre
Solliciter l’Agence de Développement Agricole (ADA), en charge du Plan Maroc Vert (PMV) en vue d’intégrer les respects sociaux dans sa stratégie
Contexte du travail saisonnier et amélioration des relations avec les travailleurs saisonniers au sein des entreprises Renforcer la pratique du travail déclaré en remettant au salarié saisonnier son contrat de travail, carte de travail, bulletin de paie et CNSS
Développer les programmes d’alphabétisation fonctionnelle
Mettre en place un système de communication à l’embauche, notamment des salariés saisonniers (droits et obligations)
Valoriser la fonction RH dans le secteur agricole et renforcer la culture des droits humains dans le secteur agricole
Renforcer l’accompagnement et le contrôle des structures d’intermédiations formelles et informelles au niveau des relations de travail
Créer un répertoire des emplois et métiers dans le secteur agricole
Lier la rémunération à la productivité et au répertoire des métiers
La Sécurité sociale Harmoniser les systèmes AMO et RAMED pour une meilleure couverture des salariés saisonniers
Créer la TFP (Taxe de Formation Professionnelle) agricole
Adopter les prestations de la CNSS aux spécificités de l’activité agricole